La dépendance commerciale croissante de la Belgique à l’égard de la Chine appelle à la vigilance

Les importations en provenance de Chine ont atteint de nouveaux sommets en Europe, dopées par la surproduction chinoise dans plusieurs secteurs et par une politique industrielle offensive. En Belgique également, les importations chinoises augmentent. Les inquiétudes se multiplient quant à la dépendance excessive à l’égard de la Chine en tant que fournisseur clé de biens stratégiques, autrement dit de biens jugés importants pour la sécurité nationale, pour la santé, pour l’énergie et pour les transitions vertes et numériques. En réaction, l’UE tente de gérer ses relations commerciales avec la Chine en suivant le mantra de la Commission, qui veut « l’atténuation des risques, pas de découplage ». Il s’agit de réduire les risques sans se dissocier de la Chine. Si les responsables politiques belges adhèrent à cette nouvelle approche, l’action sur le terrain est entravée par la fragmentation des compétences au sein du pays.

Dépendances stratégiques : cartographie des vulnérabilités belges

Afin d’éclairer le débat public, cet article présente les principales expositions commerciales de la Belgique à la Chine et les vulnérabilités qui y sont associées. L’exposition directe de la Belgique à la Chine sur le front des importations et des exportations est – en termes relatifs – inférieure à celle de l’UE, et de l’Allemagne en particulier. Pour autant, la composition des importations belges en provenance de Chine a évolué ces dernières années, reléguant au second plan le textile et les jouets au profit de produits plus sophistiqués tels que l’électronique et les véhicules électriques. Du côté des exportations, la part croissante des produits chimiques dans les exportations belges vers la Chine retient l’attention. Une analyse systématique au niveau des produits révèle que si la Chine est de loin le principal fournisseur extracommunautaire de biens stratégiques de l’UE, il n’en va pas de même pour la Belgique. Notre pays n’en est pas moins fortement dépendant de la Chine pour quelque 50 de ses 200 importations stratégiques identifiées, lesquelles vont des vitamines et des matières premières chimiques industrielles aux barres en acier, les lampes LED et les aimants permanents. Parallèlement, les exportations de la Belgique pour lesquelles la demande extracommunautaire est très concentrée ont tendance à se diriger vers d’autres destinations, notamment le Royaume-Uni, les États‑Unis et l’Inde, à quelques exceptions près pour certains produits tels que les catalyseurs chimiques.

Au-delà du commerce direct de la Belgique avec la Chine au niveau macroéconomique, nous décelons d’autres poches de vulnérabilité. Les données relatives à la valeur ajoutée suggèrent que des secteurs belges tels que la fabrication de textiles, l’électronique et les métaux de base sont indirectement exposés à la Chine par le biais des chaînes d’approvisionnement internationales. En raison de la présence de nombreuses entreprises multinationales en Belgique et dans le contexte plus large du marché unique, les flux commerciaux entre les autres États membres de l’UE et la Chine importent également pour la Belgique. En plus, une analyse plus détaillée au niveau des entreprises permet de constater que l’exposition à des perturbations potentielles de l’approvisionnement en intrants chinois critiques varie considérablement d’une région géographique à l’autre, d’un (sous-)secteur à l’autre et d’une entreprise à l’autre au sein d’un même secteur, ce qui met en évidence la nécessité d’adopter des mesures de réduction des risques bien ciblées.

Suivre l’évolution des relations commerciales belgo-chinoises et des politiques de l’UE

En tout état de cause, les responsables politiques et les entreprises belges seront de plus en plus confrontés aux conséquences de la stratégie européenne de réduction des risques liés à la Chine, lesquelles vont des droits de douane punitifs à l’importation et des contrôles à l’exportation (éventuels), le renforcement des procédures de filtrage des investissements et des obligations de déclaration aux retombées des politiques industrielles de l’UE et des États membres visant à contrecarrer l’hégémonie chinoise dans certaines chaînes d’approvisionnement. C’est la raison pour laquelle il est essentiel de continuer à suivre l’évolution de l’exposition commerciale de la Belgique à la Chine ainsi que les politiques européennes en la matière.